Le Juge des Référés du Conseil d’Etat par deux ordonnances n° 439821 et 439827, en date du 8 avril 2020, rejette les requêtes qui demandaient à ce que des mesures sanitaires supplémentaires soient prises dans les établissements pénitentiaires demandées par le syndicat de personnels pénitentiaires et par les organisations représentant les détenus
S’agissant des mesures demandées par le syndicat de personnels pénitentiaires, le ministère s’est engagé durant l’audience à satisfaire la demande des personnels avec une dotation suffisante de gants à usage unique pour les contacts directs avec les détenus et une nouvelle livraison de 2 500 litres de gel hydro-alcoolique par semaine. En outre, le juge des référés rappelle que le ministère a décidé d’imposer le port d’un masque chirurgical à l’ensemble des agents se trouvant en contact à la fois direct et prolongé avec les personnes détenues. Un stock de 260 000 masques chirurgicaux a déjà été alloué à l’administration pénitentiaire à cet effet et la ministre s’est engagée à assurer, sans rupture, l’approvisionnement de façon à satisfaire l’ensemble des besoins journaliers (2 masques par agent pour chaque jour de présence, soit 17 600 masques).
En revanche, le juge des référés a estimé que le maintien du régime de détention « Portes ouvertes » et de promenades adaptées permettait de ménager l’équilibre entre la sécurité sanitaire des personnes au sein des établissements pénitentiaires et l’obligation d’y garantir l’ordre et la sécurité. Le régime « Portes ouvertes », qui consiste à laisser les portes des cellules ouvertes pour permettre la circulation des détenus, est en effet de nature à éviter des tensions et des risques de troubles au sein de ces établissements.
S’agissant des mesures sollicitées par les organisations représentant les détenus, le juge des référés a relevé que des consignes générales ont été données à l’ensemble des établissements pénitentiaires d’effectuer un nettoyage renforcé et une aération régulière des locaux et d’organiser les douches collectives de manière appropriée. A la demande du juge des référés, l’administration pénitentiaire a également défini à l’issue de l’audience des mesures d’hygiène devant être appliquées dans les cuisines de ces établissements.
Le juge des référés observe également que des consignes ont été transmises dès le 27 février afin de faire respecter les « gestes barrières ». L’ordonnance relève qu’il appartient aux chefs d’établissements de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’assurer le respect effectif de ces consignes au sein de leurs établissements.
En outre, des mesures ont été prises afin de limiter les mouvements à l’intérieur des établissements et de réduire les flux de circulation entre l’intérieur et l’extérieur. Les visites aux parloirs et l’essentiel des activités collectives ont ainsi été suspendus. Le juge des référés relève toutefois que des mesures spécifiques ont été prises afin de garantir le maintien des liens familiaux des personnes détenues, notamment par téléphone, et les échanges avec leurs avocats.
De plus, l’administration pénitentiaire a, à l’issue de l’audience, défini clairement la conduite à tenir dans les établissements afin que puissent être détectées, dans les meilleurs délais, les personnes détenues présentant les symptômes du covid-19. Elaboré à la demande du juge des référés, ce protocole repose sur une responsabilité partagée entre les personnes détenues, le personnel pénitentiaire et les équipes des unités sanitaires en milieu pénitentiaire.
Au regard de ces mesures et de la stratégie de gestion et d’utilisation maîtrisée des masques mise en place à l’échelle nationale, le juge des référés rejette les demandes tendant à la distribution de masques et à l’organisation de tests de dépistage pour tous les détenus.
Enfin, le juge des référés relève la diminution régulière du nombre de personnes détenues (72 575 au 16 mars, 65 757 au 2 avril 2020) sous l’effet conjugué de la baisse du nombre d’écrous et de l’application des dispositifs de libération des personnes détenues. Il précise, en revanche, en réponse à la demande formulée par les organisations représentant les détenus, qu’il n’a pas le pouvoir d’accroître la portée de ces dispositifs de libération, une telle mesure relevant de la loi.
Compte tenu de l’ensemble des mesures déjà prises et des consignes supplémentaires qui ont été édictées par l’administration pénitentiaire à la demande du juge des référés à l’issue des audiences pour tenir compte des échanges qui avaient eu lieu entre les parties, le juge a estimé que l’existence d’une atteinte grave et manifestement illégale aux droits des personnes détenues et du personnel pénitentiaire n’était pas établie. Il a donc rejeté les demandes.